Fin de la traversée


 

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J16 - La centaine d’amour

J’ai commencé mes délires culinaires. C’est un peu tôt dans ce voyage et il faut que je me contrôle mais c’est quasiment toujours le même. Je rêve que je mange des tomates à la vinaigrette. Je finis par y penser le jour et en fin de voyage, quand j’arrive, j’en profite pour en manger régulièrement avec un bonheur extatique puis cette ivresse s’atténue. Pourquoi faut-il que l’on retrouve ce que l’on aime quand on le perd ? Et tu peux toujours essayer de reproduire cette mécanique de manque artificiellement, ça ne marche pas, il faut le perdre. En ramant je pensais « Sauf peut être dans le poème de Pablo Neruda, « La centaine d’amour » du recueil que j’ai avec moi. Sont malins ces poètes ! Mais je t’arrête tout de suite, n’essaye pas de lire mes états d’âmes dans ce poème, car moi, je pense à une tomate à la vinaigrette quand je lis ça, c’est juste pour illustrer. De plus, je conseille à mes potes de ne pas envoyer ça à une femme pour la séduire. A tous les coups elle va s’arrêter sur le titre et te dire « Heinnnn, c’est quoi ce poème de polygame », elles cherchent toujours un message caché et si elles le trouvent dans le titre, t’es mort.

La centaine d’amour,

Sache que je ne t’aime pas et que je t’aime
Puisque est double la façon d’être de la vie,
Puisque la parole est une aile du silence,
Et qu’il est dans le feu une moitié de froid

Moi je t’aime afin de commencer à t’aimer,
Afin de pouvoir recommencer l’infini
Et pour que jamais je ne cesse de t’aimer :
C’est pour cela que je ne t’aime pas encore.

Je t’aime et je ne t’aime pas, c’est comme si
J’avais entre mes deux mains les clés du bonheur
Et un infortuné, un certain destin.

Mon amour a deux existences pour t’aimer.
Pour cela je t’aime quand je ne t’aime pas
Et c’est pour cela que je t’aime quand je t’aime.

Pablo Neruda