J152 - Histoire à dormir debout
"Elle est tellement tellement belle... Un paquebot géant, dans l’chambre à coucher"
De qui est cette chanson ?
Si vous trouvez, vous êtes forts... Je vous donne le titre : "Tu m’aimes tu ?".
Hier matin ,au lever du jour, un cargo est passé dans ma zone de détection et j’ai stressé car le jour se levait : on voyait mal et je n’apercevais que sa lumière arrière... En fait, c’était un petit cargo... un roquet...
Puis la journée fut pénible sous ancre flottante à rien foutre, avec des grains, de l’orage, et beaucoup de vents contraires renforcés par les grains...
Arrive l’heure du coucher du soleil : il faisait très très sombre, car un orage approchait ; mon feu de position s’était même allumé automatiquement depuis un bon moment...
Puis à nouveau cette satanée alarme de cargo : au plus mauvais moment, entre chien et loup, avec l’orage, et sous ancre...
Ensuite les alarmes sonnaient de façon de plus en plus rapprochée, mais je ne voyais pas la bête.
Je me dit : "C’est l’enfer, il est sous l’orage, et il va me sortir sous le nez...Dans 10 mn je suis sous la pluie, et on n’y verra plus à 10 mètres"... J’étais comme dirait l’autre, "pas très bien"... Mais ça faisait déjà une demi-heure depuis la première sonnerie, et d’après mon expérience, si je ne l’ai pas vu après ce délai, en général, il passe loin... Je sentais donc que je ne risquais quasiment plus rien...
Ensuite, les alarmes devenaient pressantes, et très rapprochées, mais toujours sans cargo...
Puis il s’est passé un truc incroyable : l’alarme s’est accélérée pour devenir extrêmement rapide, et puis plus rien... Comme pour l’impact d’un missile... J’y ai pensé... et là je me suis dit : "ça doit être un sous-marin, et vu que je suis à 150 bornes des Samoa Américaines, si c’est des américains, ils ne vont pas me descendre juste pour rigoler"...
Si si, je vous jure que je pensais ça...
Je n’étais pas bien du tout, et en regardant droit devant, vers l’Est, je vois, à 200-300 mètres, sortir de l’eau une énorme masse noire, qui retombe dans une éclaboussure en forme de geyser... puis je vois une queue de baleine qui plonge...
C’était dingue, je n’en pouvais plus...
Ça n’a rien à voir, mais c’est arrivé en même temps : j’étais impressionné et pas rassuré du tout car ça faisait beaucoup d’un coup, d’autant que j’ai appris qu’une baleine a déjà coulé un voilier au Cap Vert...
Je n’hallucinais pas, car elle a replongé 10 minutes plus tard mais complètement vers le Sud cette fois...
Tout était puissant : l’océan, l’orage, le cargo attendu, et cette baleine...
Je suis rentré dans la cabine en me disant : "c’était trop, j’ai eu vraiment la trouille"...
J’étais crevé à force de ne rien faire, et je me suis endormi tôt... Sauf que cette nuit, la foudre est tombée abraracourcix sur les Samoa et a à nouveau déclenché mon alarme...
Comme dit Romain, mon pote d’Amiens : "si tu voulais glander sur une chaise longue, t’avais qu’à aller au club Med".
Finalement, un orage c’est juste impressionnant, les cargos te voient avec leur radar, le risque de collision est très faible, et une baleine c’est banal par ici et plutôt placide...
Aujourd’hui, ça va, c’est cool.